Source :
Le Média, 22 septembre 2020.
« Au début du confinement, le ministre de l’Agriculture Didier Guillaume appelait les français sans activité ou au chômage partiel à « travailler dans les champs » pour palier au manque de main d’oeuvre agricole et éviter une pénurie alimentaire à cause de la fermeture des frontières.
La dépendance de notre modèle agricole à la main-d’œuvre étrangère n’est cependant pas récente. Chaque année, environ 11,000 ouvrier.e.s agricoles étranger.e.s saisonnier.e.s viennent travailler dans le seul département des bouches du Rhône. Ces travailleur.ses migrant.es, en provenance d’Amérique du Sud, d’Afrique du Nord et subsaharienne sont très présents en viticulture, maraîchage et arboriculture intensifs. Ils et elles enchaînent les missions saisonnières dans nos champs, et pourtant nous ne les voyons pas.
Derrière cette invisibilité, se cache des conditions de travail et de vie très dures et précaires, parfois même indignes, facilitées par la pratique de plus en plus répandue du “détachement”. Ce système permet à un.e exploitant.e agricole français, de sous traiter le recrutement et la gestion administrative d’un salarié.e agricole à une boîte d’interim espagnole et de faire ainsi de nombreuses économies : en gestion de personnel, en heures supplémentaires, prévention…
Des procès, dont celui en cours de Yasmine contre l’entreprise espagnole Laboral Terra (ex salariées agricole marocaine) qui témoigne dans ce reportage, dénoncent depuis quelques années ces pratiques frauduleuses et plus largement de contournement du droit du travail français.
En lame de fond, se pose aussi la question de notre rôle, en tant que consommateur.rice, qui en n’ouvrant pas les yeux sur les produits que nous achetons participons à entretenir l’orientation productiviste, intensive et industrielle de notre agriculture qui sont à la base de ces conditions de travail.
Aller plus loin : Pour mieux regarder la réalité du travail agricole qui se cache derrière nos aliments, il existe certaines initiatives comme le réseau AMAP ou Près de chez nous.
Crédits :
Réalisation et montage : Caroline Delboy Renfort montage : Alexis Debaye Photos reportage : Caroline Delboy, Frédéric Décosse, Nelly Berrones, Yasmine, Vidal C, Mathieu Eisinger